Lucrèce | De rerum natura

Lucrèce | 98 (Pompéi) – 55 (Rome)

Presque aucuns éléments sur sa vie.

Tempérament angoissé (contrairement à Epicure).

« On entend dans son vers les spectres qui s’appellent » (Victor Hugo)

Peut-être suicidé (conjecture).

Apprécié d’Ovide. Évoqué par Cicéron et Tite-Live.

Passé sous silence sous l’Empire (très religieux).

Le manuscrit presque achevé aurait été laissé à Cicéro à sa mort, selon saint Jérôme (IV-V s.), ce qui est peu probable.

Connu par citations jusqu’à la redécouverte du manuscrit.

Manuscrit retrouvé en 1417 par le Pogge. Diffusé à partir de 1430.

Lu par Montaigne, Gassendi. Traduit par Molière.

Influence sur La Fontaine qui se réclame d’Epicure et de Lucrèce.

Apprécié de Diderot.

=> Lucrèce a permis de maintenir un matérialisme radical.

Dans la même lignée, Karl Marx a consacré sa thèse à « La différence entre la philosophie de Démocrite et celle d’Epicure » et Paul Nizan a écrit Les Matérialistes de l’Antiquité (publié posthume en 1965).

Pensée examinée dans sa modernité par Michel Serres.

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De rerum natura

Traduit le grec « Peri Phuseos », titre courant (surtout chez les pré-socratiques), utilisé par Epicure.

= ces philosophes étaient des physiciens, c’est-à-dire qu’ils réfléchissaient sur la nature de l’univers afin d’en donner une explication hors de toute intervention divine.

Phuein = « donner naissance ». « Natura » vient de « nascor » : « naissance » et « ordre naturel ».

– éloge de la pensée d’Epicure : philosophie atomiste

– lutte contre les superstitions

– célébration de l’univers infini et la puissance de la vie

– réfute Aristote en affirmant l’existence du vide, en refusant l’éternité du monde

=> combat théorique mais aussi moral.

Adressé à Memmius. Sans doute l’homme politique proche de Pompée, protecteur des poetae novi (Catulle était dans la suite de Memmius).

6 livres = 7400 hexamètres

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Livre I (1117 vers) : la nature

= les atomes et le vide

v.1-53 Invocation à Vénus et dédicace à Memmius (interlocuteur de tout le poème).

v.54-61 Exposition du sujet

v.62-79 Eloge d’Epicure.

v.80-102 Le sacrifice d’Iphigénie (critique de la religion)

v.102-144 Il faut vaincre la peur par la connaissance de la nature (luttre contre les faux prophètes)

v.145-173 Premier principe : Rien ne naît de rien

v.174-214 Autres preuves

v.215-264 Rien ne retourne au néant

= Premier principe : l’être ne peut sortir du néant ni y entrer (en accord avec Démocrite, Epicure et Aristote).

v.265-297 Les corps invisibles : on ne peut mettre en doute l’existence des atomes

établit à partir de là l’existence de corpuscules primitifs invisibles : atomes.

Le vent, les odeurs sont invisibles.

Tous les corps sont formés d’atomes.

La mort est la décomposition d’un organisme constitué en ces particules primitives.

v.298-328 Preuves de l’existence des atomes

v.329-418 Existence du vide : le vide leur permet d’agir, de se mouvoir, d’exister.

v.419-448 Tout se ramène aux corps premiers ou au vide : rien n’existe en dehors de la matière

L’univers est le résultat de la matière et du vide.

Ce qui n’est ni matière ni vide est propriété ou accident.

v.449-482 Statut du temps (tout ce qui a un nom n’existe pas pour autant)

– sans existence propre (v.459) : le sentiment de l’achèvement vient des choses (v.460)

v.483-519 Les corps premiers ou atomes dans la nature : les atomes sont éternels

v.520-564 La théorie de l’immortalité des corps premiers est nécessairement juste

v.565-598 Seule la théorie de Lucrèce rend compte du monde tel qu’il est

v.599-634 Constitution de l’atome : l’atome est composé de parties inséparables

v.635-704 Réfutation d’Héraclite, pour qui le principe premier est le feu

v.705-829 Réfutation des autres cosmologie : réfutation d’Empédocle

v.830-920 Réfutation d’Anaxagore et de son « homéométrie » (assemblage)

v.921-950 Apologie du poème (I) = le second ouvre le livre IV

v.951-1051 L’univers est infini

il est indestructible dans ses principes, et infini dans sa masse

ne comporte pas de centre

v.1052-1117 Création et destruction des mondes : contre la conception stoïcienne de l’univers

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Livre II (1174 vers) : sur les atomes

=mouvement et propriétés des atomes : la formation des corps

v.1-66 La sagesse = éloge de la philosophie

v.67-141 Le mouvement des atomes

= les changements continuels des corps excluent l’hypothèse d’une matière immobile

Il n’y a pas de centre où les atomes puissent s’arrêter.

v.142-166 Vitesse des atomes

Ce mouvement est rapide, car dans le vide rien ne lui fait obstacle

v.167-183 Négation de la providence

v.184-250 Poids et déviation (clinamen : l’infime déclinaison qui explique la rencontre des atomes)

La direction est de haut en bas. Mais leur chute n’est pas rigoureusement parallèle, sinon ils n’auraient pas pu s’unir en masse ni dévier d’une direction nécessaire pour former des âmes libres.

Il faut donc admettre qu’ils s’écartent légèrement de la direction perpendiculaire.

v.251-293 La liberté

v.294-332 La création continue

Les atomes ont toujours joui et jouiront toujours parce que la quantité de mouvement est toujours la même dans la nature.

Nous le savons par raison car les sens ne peuvent apercevoir l’atome.

v.333-441 Variété des formes atomiques

Si les atomes étaient tous identiques, les corps ne pourraient agir sur nos sens de manière si différente

v.442-476 Conséquences diverses

v.477-521 La variété des atomes n’est pas infinie, leur nombre et leur classe est bornée

v.522-580 Mais le nombre d’atomes dans chaque classe de figure est infini

v.581-588 Combinaisons variées des atomes à partir d’un nombre peu considérable de figures

v.589-599 Exemple de la terre

v.600-660 Cybèle

v.661-729 Autres exemples de combinaisons

v.730-841 Les atomes sont incolores

La solidité, l’indivisibilité, l’éternité, le mouvement et la figure sont les qualités de ces corps simples.

Les qualités saisies par les sens sont le résultat d’associations.

v.842-885 Absence d’autres qualités dans les atomes : ils ne sont pas sensibles

v.886-1022 Polémique sur l’origine de la sensibilité : ce n’est que leur situation et leurs mouvements respectifs qui produisent la sensibilité de certains assemblages.

v.1023-1043 Annonce d’une vérité nouvelle

v.1044-1089 L’univers et les mondes

Ces atomes ont produit notre monde, mais aussi une infinité d’autres.

La puissance de la nature est sans borne.

Notre monde n’est qu’un individu particulier dans une classe nombreuse, et comme individu il est comme tout autre soumis à la naissance, à la croissance, au déclin et à la mort. Le monde, après une phase de croissance, est dans une phase de dépérissement.

v.1090-1104 Les dieux ne gouvernent pas le monde

v.1105-1174 Le destin naturel du monde

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Livre III (1094 vers) : l’âme

L’ignorance de la nature inspire la crainte de la mort.

L’ignorance est l’unique source des maux et des crimes.

L’âme est une partie réelle de nous-même, et non une « harmonie » (une affection générale de notre organisme). L’âme et l’esprit forme une même substance.

Âme et esprit sont corporels, formés des atomes les plus subtils.

Âme et esprit résultent de l’association de 4 principes : souffle, air, chaleur et principe de sensibilité.

Mélangés et combinés, sans jamais agir séparément, ces principes dominent plus ou moins : d’où la différence de caractères.

L’âme et le corps sont unis.

Contrairement à ce que dit Démocrite, on ne peut faire correspondre un élément de l’âme à chaque élément du corps.

=> l’âme naît et meurt en même temps que le corps.

La mort n’est donc pas à craindre, elle fait de l’homme ce qu’il était avant de naître.

v.1-93 L’oeuvre d’Epicure

v.94-177 L’âme et l’esprit

v.178-230 Nature atomique de l’esprit

v.231-287 Composition de l’âme et de l’esprit

v.288-322 Les caractères innés

v.323-349 Unité du corps et de l’âme

v.350-416 Les mouvements sensitifs

v.417-444 L’esprit et l’âme naissent et meurent : ils se dissipent dans l’air après la mort

v.445-525 Ils se développent et souffrent avec le corps

v.526-547 L’âme agonise avec le corps

v.548-633 L’âme ne peut subsister avec le corps

v.634-669 L’âme est divisible et donc mortelle

v.670-712 L’âme inhérente au corps est mortelle

v.713-740 L’âme et les vers du cadavre

v.741-805 La migration des âmes est impossible

v.805-829 L’âme n’a aucun des caractères de l’immortalité

v.830-930 Ce qu’est la mort

v.931-977 Prosopopée de la nature

v.978-1023 L’enfer n’est qu’une allégorie

v.1024-1052 La mort est la loi commune

v.1053-1075 Le remède au mal de vivre

v.1075-1094 Epilogue

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Livre IV (1287 vers) : sens et sensations, théorie des simulacres

= expliquer l’action des objets extérieurs sur l’âme, par les sens.

= Des simulacres s’introduisent dans les divers conduits de nos corps et affectent nos âmes.

Plusieurs classes :

émanations : envoyés par les corps mêmes de la surface ou de l’intérieur des objets ;

– d’autres se forment dans l’air ;

– d’autres sont un mélange que le hasard réunit dans l’atmosphère.

=> tous sont d’une très grande vitesse, et d’une subtilité inconcevable.

v.1-45 Apologie du poème (II)

v.46-109 Les images des choses

v.110-142 Leur subtilité

v.143-175 Rapidité de leur formation

v.176-217 Leur vitesse

v.218-229 Tous les corps ont des émanations

v.230-268 Phénomènes de la vision = produite par des simulacres qui émanent de la surface des corps.

v.269-323 Les miroirs

v.324-378 Phénomènes divers de la vision

v.379-468 Illusions visuelles = nos erreurs ne viennent pas de la sensation qui est éprouvée, mais de la précipitation de l’esprit.

v.469-521 Polémique sur les sens : les sens, eux, sont des guides infaillibles.

v.522-556 Les autres sens : l’ouïe. L’audition est provoquée par des corpuscules détachés des corps, qui viennent frapper l’organe de l’ouïe. Façonnés par la langue et le palais, ce sont des paroles.

v.557-614 Effet de la distance ; l’écho. Les corpuscules répercutés par des corps solides produisent des échos.

v.615-672 Le goût. La saveur vient des sucs exprimés par les aliments lorsqu’ils sont mâchés. La sensation peut différer selon l’organisation des différentes espèces animales, ainsi que selon les molécules qui produisent des sucs.

v.673-705 L’odorat. Les odeurs sont des groupuscules émanés de l’intérieur des corps, eux aussi ressentis différemment par des organes différents.

v.706-721 Répulsions de la vue

v.722-824 La vision de l’esprit. Les idées proviennent des simulacres dont l’atmosphère est sans cesse remplie. Mais leur texture est déliée : c’est ainsi que ces simulacres s’insinuent par les pores du corps. Leur succession et leur combinaison sont si rapides qu’une foule d’idées assiègent nos esprits à chaque instant : images chimériques de centaures et mille autres illusions qui nous égarent.

v.825-857 Refus des causes finales : l’organe crée la fonction = il faut rejeter les causes finales. Nos organes n’ont pas été faits en vue de nos besoins. C’est parce qu’ils sont donnés que les hommes les utilisent.

v.858-876 La faim et la soif relèvent d’un besoin naturel pour tous les animaux.

v.877-906 La marche et le mouvement : l’âme, substance déliée, peut mouvoir une masse aussi pesante que celle de notre corps.

v.907-962 Le sommeil : engourdit toutes les facultés de l’âme et du corps.

v.963-1029 Les rêves se produisent naturellement.

v.1030-1057 La puberté et l’amour : se méfier de l’amour…

v.1058-1191 Malheurs et illusions de la passion : …à cause du malheur des amants.

v.1192-1208 Réciprocité du plaisir

v.1209-1232 Hérédité

v.1233-1277 Stérilité et fécondité

v.1278-1287 Epilogue

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Livre V (1457 vers) : la formation de l’univers

= géologie

= anthropologie (langage, feu, musique, artisanat, tissage)

v.1-90 Eloge d’Epicure

v.91-145 Mortalité du monde : le monde a eu un commencement et aura une fin.

v.146-235 Les dieux sont étrangers au monde

v.236-350 Les parties du monde sont mortelles

v.351-379 Le monde ne remplit aucune des conditions de l’immortalité

v.380-395 La lutte du feu et de l’eau : les éléments sont soumis à des vicissitudes et à des altérations perpétuelles. Des causes travaillent constamment à la destruction du monde.

v.396-415 Phaéton

v.416-508 Naissance du monde : l’univers s’est formé par le concours fortuit des atomes. D’abord confondus en une seule masse, les molécules homogènes et hétérogènes se différencièrent peu à peu du choas, selon leur pesanteur. La terre prit forme et place, puis les mers, les montagnes et les fleuves se développèrent.

v.509-533 Mouvement des astres

v.534-563 Equilibre de la terre : la terre est suspendue au milieu des airs.

v.564-591 Grandeur du soleil et de la lune

v.592-613 Chaleur du soleil

v.614-649 Cours relatifs du soleil, de la lune et des astres

v.650-679 La nuit et le jour

v.680-704 Inégalité des jours et des nuits

v.705-750 Les phases de la lune

v.751-770 Les éclipses

v.771-836 Premières productions de la terre

v.837-877 Monstres et espèces disparus

v.878-924 Animaux légendaires

v.925-1027 Les premiers hommes

v.1027-1090 Origine du langage

v.1091-1107 La découverte du feu fait disparaître la barbarie.

v.1108-1135 Origine des cités et de la richesse. Les citadelles ont été fondées pour se protéger. Puis on inventa les richesses (v.1115), et on abandonna la frugalité : la violence arriva.

v.1136-1160 Renversement des rois ; le droit et la justice. Lassés de la violence, les Hommes créèrent les lois.

v.1161-1240 La notion de dieux ; la superstition. Critique de la religion : elle s’explique à partir de simulacres illusoires qui se présentent la nuit, la peur des dangers naturels.

v.1241-1296 Métaux, armes et outils

v.1297-1349 Evolution des techniques de la guerre : art et destruction se développent ensemble.

v.1350-1359 Le tissage

v.1360-1378 Progrès dans la culture du sol

v.1379-1435 Origine de la musique et des arts

v.1436-1457 Progrès des connaissances et des arts

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Livre VI (1286 vers) : les météores (phénomènes atmosphériques)

Les météores sont les principales sources de superstition parmi les hommes.

Tonnerre, éclairs et foudre ne viennent pas de Jupiter, mais de vapeurs qui s’enflamment naturellement.

v.1-95 Eloge d’Athènes

v.96-159 Le tonnerre

v.160-213 L’éclair

v.214-322 La foudre

v.323-378 Vitesse et force de la foudre

v.379-422 La foudre n’est pas divine

v.423-450 La trombe marine

v.451-494 Les nuages

v.495-534 La pluie et l’arc-en-ciel

v.535-607 Les séismes

v.608-638 Le niveau de la mer

v.639-708 L’Etna

v.709-737 Les crues du Nil

v.738-839 Les Avernes

v.840-847 Température de l’eau des puits

v.848-878 La fontaine d’Hammon

v.879-905 Sources incendiaires

v.906-1090 L’aimant

v.1091-1137 Maladies et épidémies

v.1138-1286 Peste d’Athènes

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